Valser avec l’hypersensibilité

Valser avec l’hypersensibilité


Texte écrit par Laure

 


Je m’appelle Laure. J’ai 40 ans depuis peu. Je voudrais partager mon expérience avec les personnes menstruées, car j’ai longtemps lutté toute seule, sans parvenir à comprendre ce qui m’arrivait et parfois dans un grand désespoir.

 

Je vous précise un peu le contexte : je suis une femme cis, et j’ai eu mes premières règles à 9 ans. Oui, c’est tôt, mais ce n’est apparemment qu’une question de génétique. Ma maman m’avait expliqué les choses de la vie, je n’ai pas été surprise, et elle m’a aidée à gérer l’aspect logistique.

 

Ce qu’elle ignorait, et par conséquent moi aussi, c’est qu’il existe une partie des humains dont la sensibilité est beaucoup plus développée que la moyenne. C’est mon cas. Je n’ai pas de pathologie liée aux règles, en revanche, je suis hypersensible, j’ai une peau atopique et de l’eczéma. Pas tout le temps, l’eczéma, et me direz-vous, quel rapport ?


C’est assez simple. La peau est le plus grand organe de notre corps et c’est aussi notre interface avec le monde, d’une façon littérale puisqu’elle isole notre intérieur organique de tout ce qui nous environne. Une peau atopique est une peau dont les barrières ne sont pas aussi efficaces que la normale et laissent passer les agressions extérieures là où une peau « classique » ou complète, pourrait-on dire, nous protège. 


Les peaux atopiques sont plus souvent sujettes aux allergies cutanées par exemple. 


L’hypersensibilité, elle, est une contrainte, une sorte de défaut de fabrication : je suis une éponge, vos émotions, celles des inconnus dans le tram, celles de mes proches, les miennes, m’arrivent comme des vagues déferlantes auxquelles je ne peux échapper. Elle a une composante sensorielle également : hypersensibilité aux bruits, aux odeurs, bref, à l’environnement. Vous voyez le rapport ?


Ma peau ne me protège pas et ma tête et mon cœur non plus. Je ne dors qu’avec des bouchons d’oreille, car le moindre bruit (la respiration de la personne éventuellement à mes côtés) me réveille. 


Prendre de la distance me demande un travail énorme. Et lorsque je n’y parviens pas, ma peau s’exprime pour moi : elle s’enflamme, littéralement, elle me brûle et me démange. 


Je sais que je ne suis pas seule et que peut être, parmi les lecteurs/trices de ce blog, d’autres connaissent des difficultés issues de leur propre corps, semblables aux miennes.


Et les règles alors? J’y arrive. J’ai noté, sans jamais trouver d’interlocuteur qui puisse m’aider à ce sujet, qu’environ une semaine avant qu’elles ne se déclenchent (elles sont par ailleurs plutôt régulières et hormis les 10 merveilleux mois d’adaptation au stérilet où je les ai eu 15 jours par mois, plutôt sur 4 à 5 jours, abondance gérable) j’avais systématiquement une poussée d’eczéma, et des difficultés encore plus importantes à gérer mes émotions.


Par exemple, si cela arrivait à un moment de conflit, je perdais complètement ma capacité à relativiser la gravité des choses et pouvait fondre en larmes ou penser au suicide à cause d’une bête dispute.


J’ai longtemps pensé que j’étais folle. Impossible à gérer, impossible à vivre (ce qui n’est pas tout à fait faux, mais pas entièrement vrai non plus).


Après avoir exposé mon cas à des professionnelles de l’utérus (gynéco, sage-femme), sans avoir de réaction particulière, c’est une dermatologue qui m’a confirmé ce que je soupçonnais : oui, les variations hormonales engendrées par l’arrivée des menstrues influent sur la peau et sur notre sensibilité. Cela va prendre des formes différentes selon les individus.


Chez moi, peut-être chez vous, ça donne à peu près ça : peau ultra sèche, notamment sur le visage, autour de la bouche (j’y vois la difficulté à exprimer le mal être ressenti à ce moment-là aussi), associée à une inflammation, une poussée d’eczéma, qui commence à se résorber toute seule au 4
e jour environ des règles.

 

Côté humeur : angoisses, visions ultra négative et cynique de la vie, spécialement si je dois faire face à des difficultés (si tout va bien, rien à signaler, mais il est plus rare que tout aille bien dans ces moments-là)

 

Attention, l’hypersensibilité est aussi un superpouvoir! Je peux vous le dire, je ne suis pas en SPM aujourd’hui : je suis aussi hypersensible à la beauté du monde, des personnes qui honorent ma vie de leur tendresse et j’ai un radar à abrutis quasi infaillible.


J’aime la différence qui pour moi est beauté, je me réjouis d’un sourire inconnu, et parfois, cela peut redorer une journée un peu terne.


En bref, je suis hypersensible aux bonheurs. C’est là ma force, où je puise souvent le courage d’affronter mes tourments. Je vous souhaite de trouver la vôtre, avec tendresse. 

 

Laure

 


Ce texte a généreusement été partagé par une femme de notre communauté avec comme objectif de diversifier les expériences & les savoirs qui sont présentés sur ce blogue. 



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